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mercredi 26 septembre 2007

Coïncidence étrange

Lecteur de journaux tant nationaux que locaux, je m'interrogais il y a quelques jours au sujet de la une de l'un des quotidiens de La Réunion, parue le 13 septembre dernier (image ci-dessous).

En titre : "Étrange coïncidence", en (très) grosses lettres et en rouge... Autant dire un titre voyant, annonciateur d'une grande nouvelle : l'ordre du monde - ou son chaos - a fait se rencontrer au hasard du calendrier deux événements importants et dont l'un aurait un lien avec l'autre !

Quels sont ces événements ?

En sous-titre, voici les informations qui doivent être raccrochées à ce titre et qui doivent éclairer cette mystérieuse et intrigante coïncidence :
- "26 décembre 2004 : Tsunami meurtrier et assassinat de Johny Catherine"
- "12 septembre 2007 : Alerte au tsunami et ouverture du procès de ses assassins [de Johny Catherine]"

...Perplexe, je m'interroge : quel est ce lieu mystérieux qui a fait se rencontrer au hasard des dates les événements relatifs au tsunami et à l'assassinat de Johny Catherine ?! Une puissance divine ou naturelle aurait-elle fé t'éxpré de concilier ces deux drames, l'un humanitaire, l'autre social ? Plus étrange encore : quel est ce mystère des choses du monde qui a fait réveiller le mysticisme d'un rédacteur en chef au point qu'il puisse voir un lien de parenté entre ces deux événements ? A-t-il voulu nous dire que c'est le tsunami qui a provoqué la mort de Catherine ? Ou peut-être l'inverse ! Mais croit-il seulement à l'existence de ce lien ? Probablement que non ! Alors, pourquoi ce titre ? En tout les cas, nous voyons-là que l'esprit fut un temps prolongé par Vollard n'est, lui, pas tout à fait mort : c'est là un titre digne de l'Absurde, puisqu'il se propose de traiter sur le même plan deux informations qui n'ont rien, mais rien à voir l'une avec l'autre, et qui par ailleurs ne sont ni de même nature, ni de même ampleur...

Je ne voudrais pas faire de polémique, mais je me dis simplement qu'il pourrait être intéressant de se pencher un peu sur la manière dont sont traitées les informations. En effet, la manière de traiter une information ne renvoie-t-elle pas à la perception que l'on peut avoir de son lectorat ? Question qui, à bien des égards, rejoint celles posées lors de notre débat au sujet du cinéma à La Réunion : quelle image renvoyons-nous de nous-mêmes ? Mais encore, quelle image nous donne-t-on de nous-mêmes ? Qui peut croire qu'il puisse exister un lien effectif, une "fausse coïncidence" donc, entre une catastrophe naturelle ayant des répercussions à l'échelle mondiale et un meurtre local ? Qui peut croire qu'il pourra faire croire qu'il existe un lien effectif entre un "raz-de-marée meurtrier" et la "mise à mort" d'un individu ?

Je constate simplement : c'est là une histoire de "croyance" puisque ce journal, par le choix de ce titre, renvoie à une image d'un lecteur superstitieux, mystique même, et un tantinet crédule... Doit-on tout avaler ? Qu'est-ce qui fait que nous renvoyons de nous-mêmes, à ceux-là mêmes qui doivent nous apporter les informations, l'image d'hommes et de femmes naïfs et crédules ? Ce titre ne soulève donc pas un problème de "coïncidence", mais pose à nouveau un problème d'image : quelle image le miroir journalistique local renvoit-il d'une société, lorsqu'il fait le tri de ses informations et le choix de ses titres pour son lectorat ?

La question mérite d'être posée, et une étude des titres parus lors de la triste épidémie de "chik" dans l'île, par exemple, semblerait pouvoir apporter bien des réponses...

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Entre l'île de La Réunion, Paris, et bien d'autres lieux dans le monde, je vous propose, via ce petit blog, de découvrir quelques artistes, publications, événements, etc. qui se rapportent tous à la culture. Une culture alter-..., c'est-à-dire, une culture différente, qui ne se découvre pas dans les magasines pipoles ou dans les écrans des tévés - ni même sur les affiches publicitaires - mais une culture qui tisse des liens entre les humanités, qui vit et que nous faisons vivre de manière originale et singulière dans nos quotidiens respectifs, à travers le monde, à travers les mondes : francophones, créolophones, etc.

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Stéphane Hoarau.